Roger Zelazny

Lu – L’œil de chat – Roger Zelazny (Denoël) Imaginaire

Lu – L’œil de chat – Roger Zelazny (Denoël)

Traduit par Luc Carissimo. Je ne te ferai pas l'affront de te présenter encore une fois Roger Zelazny, et ce qu'il représente pour moi, je t'en ai déjà parlé. Cependant, je suis loin d'avoir lu tous ses ouvrages et c'est pourquoi ce livre a attiré mon œil (c'est le cas de le dire) lors d'un passage en librairie d'occasion. L'œil de chat est un court roman se déroulant dans un futur quelconque et narrant l'histoire de Billy Singer, un chasseur d'origine Navaro. Plus grand traqueur de son temps, ses missions et les voyages cosmiques qu'elles ont engendrés ont modifié le cours de son temps et le voilà dernier survivant de son peuple. Appelé à l'aide par le gouvernement, il est chargé de neutraliser une terroriste et, pour le seconder, fait appel à un être télépathe et métamorphe qu'il a jadis traqué et fait enfermer dans le zoo de San Diego. Il ne tarde pas à se retrouver à la merci de ce dernier. L'œil de chat est un roman atypique dans sa forme, une longue litanie enchaînant les changements de points de vue, les descriptions de visions, les légendes et une intrigue laissant la part belle à l'introspection. Car si l'histoire conte une traque, l'enjeu majeur est celui du personnage principal, qui se retrouve perdu à un carrefour dans son existence, et aura le choix. Dans ce roman, l'auteur fait mouche en abordant des thèmes très humains : le déracinement, le renoncement, la fatigue de vivre, le mal être et la culpabilité. Singer est au tournant d'une vie qui ne semble plus vouloir de lui et parait déchiré entre l'envie d'en finir, une solution simple, et celle plus complexe et douloureuse d'aller puiser au fond de lui et des croyances de son peuple et d'affronter son chindi, son "mauvais génie". J'ai trouvé ce livre bouleversant. Il fait partie de cette catégorie si particulière, rare, et chère à mon cœur de ceux qui se servent du fantastique comme le plus parfait des médium pour parler de ce qui fait l'essence d'un être. Ce livre ce n'est pas simplement une histoire, c'est une introspection, beaucoup plus poussée que celle, déjà intéressante, esquissée par l'auteur dans 24 vues du mont Fuji par Hokusai. Il a en plus l'avantage de plonger profondément son lecteur au cœur des légendes Navajos, ce qui est des plus original. On pourra être dérouté par la structure du livre, car il n'en a pas vraiment. Le récit n'est pas organisé mais est constitué d'un ensemble de morceaux de récits, alternant les protagonistes et retours en arrière, dialogues, extraits de communications, chansons... Oui, l'œil du chat est un roman parfois difficile d'accès (surtout au début), oui, il cherche à embrouiller le lecteur et oui, je pense que le procédé est parfait pour se mettre dans l'état d'esprit adéquat pour recevoir l'essence même du récit.…
Lu – 24 vues du mont Fuji par Hokusai – Roger Zelazny (Le Belial) Imaginaire

Lu – 24 vues du mont Fuji par Hokusai – Roger Zelazny (Le Belial)

Traduit par Laurent Queyssi. Je trouve le format novella vraiment intéressant. Roman court ou longue nouvelle, il entraîne souvent le lecteur dans un récit à peu de personnages, centré sur une histoire précise, laissant suffisamment de temps pour développer ses propos sans s'appesantir.Il n'est pas facile pour un auteur de trouver un bon rythme, de clore une histoire sans frustrer. Dans 24 vues du mont Fuji par Hokusai, Zelazny réussi parfaitement l'exercice. Hokusai pour moi, comme pour beaucoup je pense, c'est avant tout cette estampe, cette vague immense et menaçante, bleue de Prusse, semblant engloutir un mont Fuji minimisé, avec une puissante force évocatrice.Je me suis intéressée il y a quelques temps à l'oeuvre d'Hokusai, découvrant sa série d'estampes 36 vues du mont Fuji dans ce qu'elle a de révolutionnaire pour l'époque. Partant de cette série de vues, Zelazny nous déroule le voyage de Mari sur les traces de l'artiste. On sait très peu de choses sur cette héroïne, mis à part le fait qu'elle porte le récent deuil de son mari. Véritable parcours initiatique, extrêmement contemplatif et poétique, j'ai trouvé que ce récit contrastait par sa douceur avec le reste de l'oeuvre de Roger Zelazny. Je n'ai malheureusement pas trouvé de précisions sur le contexte dans lequel il a été écrit, j'aurais aimé savoir ce que l'auteur traversait à ce moment là. Assez cryptique, tout du moins au début, 24 vues du mont Fuji par Hokusai m'a surpris par sa mélancolie et l'atmosphère assez résignée qui s'en dégage. Avançant à tâtons, à un rythme assez lent pour ce genre littéraire, j'ai parfois eu le sentiment que les impressions et pensées de l'héroïne étaient plus importantes que l'histoire. J'ai fini par y retrouver des thèmes chers à l'auteur,comme l'immortalité ou la quête de pouvoir, mais sous un angle complètement différent de celui auquel j'étais habituée. Je conseille donc vraiment la lecture de ce court roman de Roger Zelazny, c'est une expérience bien différente de ses autres livres, enveloppante et dépaysante, qui consolide en outre tout le bien que je pense de cette collection des éditions Le Bélial, 1 heure lumière.…